Pendant une journée de l’année 1975, à New York, quinze personnages criblés par la misère se bousculent aux guichets d’un centre d’aide sociale. La metteuse en scène Julie Deliquet, artiste associée de La Coursive, s’approprie l’œuvre majeure du documentariste Frederick Wiseman pour signer une fresque bouleversante d’humanité.
Créé pour l’ouverture du Festival d’Avignon 2023 dans la Cour d’honneur du Palais des papes, ce spectacle est d’abord la rencontre étonnante entre deux grands artistes. D’un côté, Frederick Wiseman, l’illustre documentariste américain (quatre-vingt-treize ans), auteur de plus de quarante films, réputé pour sa critique inlassable des institutions de son pays. De l’autre, Julie Deliquet, l’une des metteuses en scène tricolores les plus douées de sa génération, connue pour ses adaptations théâtrales de longs-métrages (Fanny et Alexandre à la Comédie-Française, Un Conte de Noël). Séduit par son travail, il lui propose de mettre en scène Welfare, l’un de ses films majeurs sorti en 1975 sur un centre d’aide sociale à New York.
L’artiste française est immédiatement convaincue. Elle s’empare de ce matériau foisonnant de vérité pour brosser le portrait de ces héros ordinaires. On suit ainsi le parcours du combattant des sans-abri, des apatrides, des travailleurs précaires et des mères célibataires, en quête de quelques dollars et d’un peu de dignité. La scène de théâtre devient un lieu d’hospitalité, où la comédie humaine se joue avec une vitalité inouïe, malgré la misère et en dépit de la diversité des problèmes sociaux. À l’heure de la dislocation des services publics, en France et ailleurs, cette pièce s’impose avec son actualité criante.
Télérama Fabienne Pascaud
Transfuge Oriane Jeancourt Galignani