Seul en scène, Jacques Weber incarne un homme au crépuscule de sa vie, guidé par l’amour de sa femme défunte. En écrivant ce texte pour ce monstre de théâtre qu’il connaît et qu’il admire, le metteur en scène Pascal Rambert signe une ode à l’amour qui survit à la mort.
C’est l’histoire d’un homme seul qui se retrouve dans sa chambre d’hôtel, à Hong-Kong. Il est écrivain, auréolé de succès, adulé par ses lecteurs et couronné de prix. Mais il est aussi vieux, désabusé et veuf. Sa femme, une autrice comme lui, l’a quitté un an plus tôt. Depuis, il ne trouve plus de sens à perdurer dans l’existence. Alors, une dernière fois, sous les néons de sa suite luxueuse, il va s’adresser au portrait de son épouse, et tout lui dire. Pour trouver un semblant de sérénité. Pour faire le point sur son existence. Et peut-être aussi pour mettre un peu d’ordre dans sa vie, avant de la quitter. Au petit matin, pourquoi pas… À voir… Avec ce personnage aux pieds d’argile composé sur mesure pour Jacques Weber, Pascal Rambert décrit avec une précision d’orfèvre la mort de nos croyances : en l’Occident, au progrès, en l’avenir… C’est un monologue sur la fin de vie, abordée avec philosophie, conscience et quiétude, sans effusion et guère plus de mièvrerie. Au fond, Ranger est une histoire d’amour qui perdure malgré la mort, grâce à la langue et à la fidélité, grâce au talent d’un immense acteur, qui, du haut de son expérience, sait tout nous dire.
Télérama Emmanuelle Bouchez