Entre théâtre, marionnettes et musique, Simon Delattre adapte le roman majeur de Romain Gary, Prix Goncourt en 1975. Le jeune metteur en scène, comédien et marionnettiste, formé au Conservatoire d’art dramatique de Rennes et à l’École supérieure nationale des arts de la marionnette de Charleville-Mézières, adapte La Vie devant soi avec justesse, sensibilité et un indéniable sens du ludique.
Mohammed, dit Momo, est un garçonnet débrouillard d’une dizaine d’années, qui voue un amour inconditionnel à Madame Rosa, ancienne prostituée, rescapée des camps de la mort. Celle-ci l’héberge en pension avec d’autres enfants « de filles parties se défendre en province ».
Sur scène, autour d’un escalier menant à l’appartement de Madame Rosa, un délicat jeu de lumières et de diffusions sonores fait apparaître le Belleville des années 70, son café du coin, la rue des prostituées, ou encore la cave, où la vieille dame vient se réfugier quand ses souvenirs d’Auschwitz reprennent le dessus. Avec son bagou pimenté de trouvailles langagières savoureuses et attendrissantes, Momo observe et questionne l’existence autour de lui. Pas toujours rose. Les personnages de son quotidien prennent chair sous forme de marionnettes astucieusement animées. Les compositions sensibles à la guitare électrique et la voix singulière de Nabila Mekkid soulignent la poésie visuelle du spectacle.
Avec la vieille Madame Rosa et son corps de plus en plus lourd à porter, l’érudit Monsieur Amil installé sur une chaise et le généreux Docteur Katz au cou longiforme, Momo a la vie devant lui et se construit une famille de cœur, pleine de solidarités.
Par un subtil et habile mélange entre théâtre narratif, arts de la marionnette et musique live, Simon Delattre relève haut la main le défi de redonner une nouvelle vie à un récit déjà maintes fois adapté.LE MONDE